Peaky Blinders
Connaissez-vous la série anglaise Peaky Blinders ? Zoom sur cette série dont la saison 3 a été diffusée depuis mai 2016 sur la BBC Two (et bien sur, sur nos écrans d'ordinateurs, nous, les méchants consommateurs de streaming ou de téléchargement -illégal-).
Une musique assez minimaliste, du style Moricconien (Inutile d'aller vérifier ; ce terme n'existe pas), se fait entendre. Travelling vertical haut. Un étalon avance au pas dans une rue sale et boueuse. Le son de ses sabots retenti. Résonne, presque. Sa robe est sombre, tout comme les bâtiments crasseux et délabrés qui l'entourent. Apparaît le cavalier, vêtu d'un élégant costume de tailleur, en tweed gris coupé à l'anglaise.
C'est en 2013 que le britannique Steven Knight crée la série dramatico-historique Peaky Blinders. Auparavant surtout connu pour avoir co-inventé et scénarisé la version anglaise de « Qui veut gagner des millions ? » (on sait à qui dire merci maintenant), le plus grand succès de Steven Knight reste tout de même son scénario de Les promesses de l'ombre mis en scène au cinéma par David Cronenberg en 2007. Diffusée sur la BBC Two en Angleterre, c'est sur Arte que l'on peut découvrir la série en France (et aussi Netflix).
L'homme tient la bride de sa monture d'une main, tandis que l'autre, la gauche, est posée sur sa cuisse. Son visage est caché par la visière de sa casquette. Tous les deux sont calmes et silencieux et continuent d'avancer dans le quartier qui est manifestement peuplé de gens pauvres.
Les changements de plans s'enchaînent alors que femmes et enfants apeurés et agités courent se cacher : des femmes le surveillent depuis les fenêtres, à l'abri des rideaux, ou derrière les charrettes où ont trouvé refuge les enfants.
Peaky Blinders tire sa trame d'un gang qui a vraiment existé dans les années 1890 (contrairement à la série qui se passe après la WW1) à Birmingham et qui se nommait... les Peaky Blinders (étonnant non ?). Ce clan tirerait son nom des lames de rasoir cousues sur la visière des casquettes qu'ils portaient et qui, de ce fait, leur servaient d'armes (les bad boys !). La principale activité des Peaky Blinders était de semer le désordre dans la ville, par des vols ou des troubles à l'ordre publique. Il y avait également des agressions visant principalement les policiers. Contrairement à la série, les Peaky Blinders recrutaient des adolescents. Et oui, la délinquance juvénile ne date pas d'hier. Le choc.
Plan d'ensemble en plongée sur la bête qui continue de marcher au pas puis travelling horizontal du cheval et de son cavalier. Le spectateur voit la scène et la vit en tant que personnage dissimulé dans la rue. Plusieurs plans se succèdent, toujours dans la même optique. Un violon se fait entendre. Plan d'ensemble. L'élégante bête s'arrête au milieu de la rue morte.
Le personnage principal de la série, Thomas Shelby, est le benjamin de sa famille et cependant le chef des Peaky Blinders -et accessoirement, le plus badass. Traumatisé par la première guerre mondiale pendant laquelle il dut combattre en France avec ses deux frères, il essaie d'oublier cela grâce à la drogue. Cependant, contrairement à son frère Arthur, son vice ne l'empêche pas de faire son travail correctement et de diriger d'une poigne ferme ses hommes dans les problèmes qu'ils rencontrent avec l'inspecteur Chester Campbell ou Darby Sabini (entre autres). Thomas Shelby est calme, intelligent, mystérieux et surtout malin. De plus, il est très protecteur envers sa famille, ce qui fait de lui un très bon chef. La famille Shelby est également composé d'Arthur, le fils aîné, colérique, nerveux, aux tendances destructrices et que Tommy doit bien souvent remettre à sa place ; John le troisième frère, jeune homme fier de faire partie des Peaky Blinders et proche de sa famille ; enfin, Finn, le plus jeune frère, que l'on ne connaît pas vraiment. Les deux personnages féminins forts sont incontestablement Ada, la sœur rebelle et Polly, la tante. Toutes deux sont indépendantes, ont une forte personnalité et elles n'hésitent pas à tenir tête à Thomas. Girl Power !
Deux personnes, un homme et une jeune fille d'origine asiatique, arrivent et se plantent devant le cheval. « La diseuse de bonne aventure ? ». Le cavalier sort de sa poche une bourse qu'il tend à l'homme. Celui-ci l'offre à la demoiselle, qui en sort une poudre écarlate. Gros plan sur le visage de l'individu à cheval. Aucune expression précise dans son regard froid, il attend seulement la suite. Comme le spectateur. Toujours silencieux. Immobile.
La série, au-delà de raconter l'histoire d'un gang et de son ascension, parle des effets dévastateurs que la première guerre mondiale a eu sur certains de ses protagonistes ; elle parle aussi d'amour et des relations entre membres d'une même famille. De plus, les personnages qui pour la plupart sont interprétés par de très bons acteurs à commencer par Cillian Murphy (Tommy), Sam Neill (Campbell), ou encore Tom Hardy (Alfie Solomons) ne se ressemblent pas. Ils ont tous des personnalités profondes, et on s'attache facilement à eux (personnellement, Arthur est mon favori). Les femmes, même s'il y en a peu, sont le plus souvent des personnages forts qui ne se cantonnent pas à être « femme de » ou « fille de ». Et ça fait du bien ! « Le changement c'est maintenant » (il serait peut-être temps dans ce domaine ceci dit) dixit un éminent homme de la politique française.
La jeune fille souffle la poudre au nez de l'animal, qui hennit. « C'est de la poudre magique, pour les faire gagner à la course ! », affirme un petit garçon. Sans un mot, les deux personnes s'enfuient en courant. Faisant faire demi-tour à sa monture, le cavalier révèle le nom de son cheval afin que les femmes puissent parier sur lui aux prochaines courses.
Peaky Blinders est sans doute une des séries où les personnages sont les plus classes (on peut pas dire ça de Breaking Bad par exemple, c.f. Jesse ou les slips sexy de Mr White...), l'époque à laquelle se passe la série y est sans doute pour beaucoup ! Donc si vous voulez que votre petit ami se décide à jeter son jean trop petit et ses tee-shirts de geeks qu'il met depuis le lycée, vous savez ce qu'il vous reste à faire... Après avoir encensé la mode de l'époque, j'ai envie de vous parler d'autre chose, un détail, qui m'a marqué quand même. C'est l'impression de regarder une peinture quand parfois les personnages sont regroupés, autour d'une table par exemple, ou d'un canapé, bref, les couleurs s'harmonisent si bien et les poses des personnages sont tellement... je n'ai pas de mot en fait pour décrire ça. En tout cas ça fait penser à un tableau et c'est fort beau. (Oui je sais que je sais vendre cette série). Enfin, ce qui est cool avec Peaky Blinders, c'est la musique. De Nick Cave à Jack White (un de mes héros) en passant par P.J. Harvey. Les guitares électriques contrastent et accompagnent avec brillance la série et surtout les scènes badass. Ce sont mes petits bonheurs quand je regarde Peaky Blinders (il m'en faut peu, je sais).
Musique du générique, plan d'ensemble. Femmes et enfants retournent à leurs occupations, comme si rien ne s'était passé, alors que Thomas Shelby, leader des Peaky Blinders, s'éloigne tout comme il est venu, en silence et calme, avec son étalon. Image digne d'un cow-boy solitaire. Ces mots apparaissent alors :
Birmingham England, 1919
Mia